MANOS (Live)

Chronique

Née à La Havane en 1983, élevée dans la grande tradition du piano classique cubain avant de bifurquer vers le jazz à l’adolescence, Marialy Pacheco s’est progressivement construit une jolie réputation, à la fois en solo et à la tête de son trio, avec une musique virtuose et lyrique mêlant aux fondamentaux du jazz parfaitement maîtrisé, un baroquisme rythmique jubilatoire hérité des traditions populaires de son pays. Révélée au public international en 2017 à l’occasion de la parution de son disque Duets, proposant comme son nom l’indique une série de duos avec quelques musiciens prestigieux et de ses amis (parmi lesquels Hamilton de Holanda, Miguel Zenon, Rhani Krija et… Omar Sosa), Marialy Pacheco revient aujourd’hui dans la même configuration minimaliste pour un disque live, enregistré durant l’été 2018, en la compagnie, cette fois exclusive, de ce véritable monument du piano jazz afro-cubain contemporain qu’est Omar Sosa. Montrant dès les premières mesures du thème d’ouverture une complicité évidente tant au niveau de leur références que d’une certaine sensibilité au clavier (fluidité du phrasé, préciosité harmonique, sens de la pulse, goût pour la mélodie et une forme de vocalité), les deux pianistes déjouent tous les écueils de ce type de dialogues (ces pianismes de surface versant immanquablement dans le bavardage…) pour proposer un discours authentiquement partagé d’une grande cohérence langagière et imaginaire. Échangeant constamment leur place et leur prérogative dans le dispositif, laissant très librement les phrases et les idées passer d’un piano à l’autre dans des jeux de miroirs et d’échos, truffés de commentaires, de digressions et d’improvisations constamment surprenants, Omar Sosa et Marialy Pacheco inventent une musique tour à tour élégiaque et festive, à la fois profuse et d’une grande clarté d’articulation, animée d’une sorte d’ivresse rythmique et d’une évidence mélodique de tous les instants. © Stéphane Ollivier/Qobuz