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Le ministre Jean-Michel ABIMBOLA, à Paris : « Le Bénin est un grand pays de patrimoine, de culture et d’art, piliers majeurs pour notre développement »

22 avril 2022
Le ministre Jean-Michel ABIMBOLA, à Paris : « Le Bénin est un grand pays de patrimoine, de culture et d'art, piliers majeurs pour notre développement »
Ministre du Tourisme, de la Culture et des Arts du Bénin, Jean-Michel Abimbola a participé, à Paris, au dévoilement d’une œuvre picturale créée par le collectif africain N.E.T. lors d’une résidence au Bénin, et dont une copie sera envoyée dans l’espace. L’occasion de souligner l’importance de la culture pour le développement du Bénin.

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Entretien exclusif réalisé par Alfred MIGNOT, AfricaPresse.Paris (APP)
@alfredmignot | @africa_presse

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Africapresse.Paris (APP) - Monsieur le ministre, lors de votre intervention, vous avez fait un rapprochement inhabituel entre agriculture et culture, considérant qu’elles sont les deux leviers du développement du Bénin. Expliquez-nous…

Jean-Michel Abimbola - Jusqu’à présent, les pays d’Afrique, et en particulier un pays comme le Bénin, consacraient l’essentiel de leurs investissements au développement de l’agriculture, secteur qui emploie le plus d’actifs. Par ailleurs, vous n’êtes pas sans savoir que le Bénin n’a quasiment pas de richesses du sous-sol, pas de pétrole, pas d’or, pas de minerais… Aussi quand on s’interroge, dans le cadre des politiques publiques, sur la diversification de l’économie pour créer de la richesse et de l’emploi pour la jeunesse béninoise, que peut-on trouver, en plus de l’agriculture ?

En procédant à l’analyse de nos potentialités, nous nous sommes convaincus que le Bénin est un grand pays de patrimoine, de culture et d’art. Ainsi, a-t-il a été décidé d’instituer désormais, pour le développement économique de notre pays, deux piliers majeurs : d’une part, l’agriculture et d’autre part, le tourisme avec la culture comme levier.
Et c’est ce que le gouvernement du Bénin s’emploie à faire depuis 2016, en investissant massivement dans les politiques publiques en faveur des secteurs du tourisme, de la culture et des arts.

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700 milliards FCFA
investis sur cinq ans

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APP – Visez-vous en particulier le développement du tourisme culturel ?

Jean-Michel Abimbola - Oui ! Le Bénin présente une exception culturelle, source d’attraction et produit d’appel pour le tourisme. On peut évoquer les palais royaux d’Abomey et leurs sites archéologiques de plusieurs siècles, les vestiges et la mémoire de l’esclavage offrant un circuit touristique mémoriel d’exception.

Le Bénin, ce sont également des figures emblématiques de la résistance de Béhanzin, des Amazones, de Bio Guéra… etc. Le Bénin est aussi un pays à fort potentiel culturel qui découle de son statut de berceau du Vodun… Nous avons donc un certain nombre d’atouts que nous continuons de travailler à valoriser, dans les villes et tout lieu riche de ce patrimoine culturel.

Ainsi le gouvernement du Bénin investit-il près de 700 milliards de francs CFA – un peu plus d’un milliard d’euros – dans les infrastructures muséales, hôtelières, touristiques et artistiques. Tout cela pour construire une riche offre touristique et culturelle.

Dans cette perspective, la demande de restitution des 26 œuvres prises par le colonel Dodds lors des campagnes de 1892-1894 n’était pas seulement une posture. Elle s’inscrit dans une dynamique d’avenir et c’est pourquoi nous avons souhaité une coopération patrimoniale et culturelle avec la France.

APP - Les débats qui ont conduit à la restitution des œuvres sont anciens, ils remontent au lendemain de l’indépendance… De ce fait, peut-on considérer qu’ils ont contribué à la prise de conscience de la richesse patrimoniale du Bénin ?

Jean-Michel Abimbola - Oui, bien sûr ! Avant même son élection, le président Patrice Talon avait déjà mis le tourisme et la culture au cœur de son projet de société. Mais vis-à-vis de la France et du monde, c’est vrai qu’il fallait poser l’acte de demande de restitution des œuvres.

Cela étant acquis, il fallait mettre en place les méthodologies, les procédures, les protocoles pour que le projet arrive à bonne fin. Cela a été possible grâce à la coopération fructueuse, intelligente et très innovante que nous avons eue avec la France, avec le gouvernement français qui a pris la courageuse, pertinente et importante décision de restituer les biens du Bénin. Nous avons ainsi abouti au retour des 26 œuvres dans les meilleures conditions… Notez que c’est la troisième plus importante restitution depuis ces deux cents dernières années !

Cet événement est le déclencheur d’un nouveau mouvement qui, j’en suis persuadé, n’est pas près de s’arrêter. Mais cela va se faire dans l’intelligence de la coopération Nord-Sud, et en ce qui nous concerne en particulier avec la France, dans notre coopération bilatérale.

Au moment du dévoilement de l’œuvre panafricaine Memory of today, memory of tomorrow », dont une copie sera projetée dans l’espace par la fusée Ariane en décembre prochain. © AM/APP

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« Pour que l’Afrique s’affirme
en acteur de l’aventure humaine »

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APP - Le Bénin est en quelque sorte co-auteur de cette œuvre picturale, Memory of today, memory of tomorrow, puisque les artistes l’ont créée en résidence chez vous. Que représente pour le Bénin cette participation ?

Jean-Michel Abimbola - Jusqu’à présent, les questions de culture, d’art et de patrimoine ne constituaient pas un déterminant des politiques publiques en Afrique. Le Bénin prend position en disant que la richesse, le développement, le bien-être, se construiront aussi à partir de ce patrimoine, de cet héritage dont nous bénéficions.

Mais le Bénin, ce n’est pas seulement l’héritage de nos trésors qui viennent de rentrer ou des trésors qui sont encore en France ou ailleurs. Le Bénin, ce sont également les talents d’aujourd’hui.
D’ailleurs en ce moment-même au palais présidentiel de la Marina, une exposition diptyque associe les arts patrimoniaux aux arts contemporains. On peut y découvrir les 26 trésors royaux récemment restitués par la France, qui sont mis en résonance avec une centaine d’œuvres d’art contemporain, fruits du génie créateur d’une trentaine d’artistes béninois. Cela pour montrer que le génie créateur béninois est éternel.

Le Bénin s’est proposé pour accueillir en résidence les trois artistes du collectif N.E.T., pendant un peu moins de deux mois à Ouidah, qui est une terre de culture, une terre d’histoire, une terre mémorielle, une terre d’exil de beaucoup d’Africains vers l’Atlantique.

Mais également, nous estimons qu’aujourd’hui Ouidah sera la terre du commencement de cette nouvelle aventure de l’Afrique vers d’autres horizons. Cette coopération avec AAD-fund (African Artists for Development, ONG française, que dirigent Gervanne et Matthias Leridon, ndlr) promoteur du projet African Space Art Project (ASAP), ainsi qu’avec Arianespace, qui permettra de projeter une copie de l’œuvre dans l’espace, est pour nous une manière d’affirmer que nous sommes là justement pour que le rêve des uns et des autres soit possible en Afrique. Ainsi, l’Afrique s’affirmera en acteur de l’aventure humaine.

Une vue de la salle. © AM/APP

APP - Des exemples de votre nouvelle offre touristique et culturelle, que vous allez mettre en place ?

Jean-Michel Abimbola - Nous avons beaucoup de produits en cours de préparation, les offres seront très importantes. Nous proposerons évidemment des offres mémorielles à Ouidah, avec la route de l’esclave et un navire grandeur nature du commerce triangulaire, à bord duquel l’on pourra simuler une immersion. Nous travaillons à la réhabilitation de quelques forts, portugais et français, pour montrer le circuit de ce commerce des esclaves, à l’époque.

Nous investissons également dans la restauration d’un certain nombre de palais, notamment les palais royaux d’Abomey, où résidaient les rois et aussi les Amazones, ces fameuses guerrières dont une partie était affectée à la garde du roi. Nous avons aussi un projet de construction d’un nouveau palais du roi de Nikki et l’arène de la Gaani, une fête identitaire historique qui mobilise des milliers de visiteurs nationaux et internationaux.
Un autre produit phare de notre offre sera la cité lacustre flottante de Ganvié, sur le lac Nokoué au sud du Bénin. De plus, nous allons proposer du balnéaire, avec notamment un Club Med 4 à 5 Tridents, etc.

APP - Quand ces nouvelles offres touristiques seront-elles disponibles ?

Jean-Michel Abimbola - Les premières infrastructures seront livrées dans le troisième trimestre de l’année en cours en ce qui concerne Ouidah. Aussi, cette année est-elle marquée par la phase active de la construction de quatre musées aux standards internationaux : le Musée international du Vodun à Porto Novo, le musée de l’Épopée des Amazones et des rois du Danxomè à Abomey, le Musée international de la mémoire et de l’esclavage à Ouidah, et le musée d’art contemporain à Cotonou.

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