CONJONCTURE. Dans la dernière étude d'opinion menée par le réseau des Chambres de métiers et de l'artisanat, 44% des entreprises artisanales affirment que la hausse des prix et les difficultés d'approvisionnement qu'elles subissent actuellement pourraient à terme compromettre leur activité. Le réseau consulaire s'alarme de ces indicateurs dépeignant, selon lui, une santé très fragile de l'artisanat.

Les craintes montent de plus en plus au sein des Chambres de métiers et de l'artisanat (CMA). Suite à la dernière enquête d'opinion qu'il a mené auprès de 13.100 chefs d'entreprises entre la fin avril et le début mai 2022, le réseau consulaire met en avant un chiffre, révélateur selon lui d'une santé très précaire de l'artisanat français : 44% des entreprises artisanales affirment que la hausse des prix et les difficultés d'approvisionnement qu'elles subissent actuellement pourraient à terme compromettre leur activité. Apparus pendant le Covid et aggravés par la guerre russo-ukrainienne, ces freins semblent s'installer durablement dans le paysage économique du pays et inquiètent pour les prochains mois.

 

 

Le sondage indique aussi que 60% des répondants disent être inquiets, voire très inquiets de l'évolution de la situation. Certes, 40% assurent dans le même temps rester optimistes, mais 33% d'entre deux relativisent cette confiance dans l'avenir à cause des incertitudes du moment. Ces chiffres concernent pleinement le secteur du bâtiment, dans la mesure où 32% des entrepreneurs interrogés travaillent dans la construction - 96% des répondants sont en outre des TPE (très petites entreprises) employant moins de 11 salariés.

 

"Les entreprises artisanales, tous secteurs confondus, sont confrontées à un manque de visibilité couplé à des augmentations de prix ininterrompues", déplore Joël Fourny, à la tête du réseau CMA. Avant d'ajouter : "Si certaines mesures du plan de résilience vont dans le bon sens, elles ne sont pas de nature à rassurer la majeure partie de nos chefs d'entreprises". Le Gouvernement avait en effet annoncé le 16 mars dernier une batterie de mesures destinées à atténuer les conséquences économiques et sociales du conflit en Ukraine.

 

Marges réduites et trésoreries fragilisées

 

Les artisans se retrouvent en fait confrontés à plusieurs problématiques. Par ordre de gravité, les sondés ont ainsi cité la hausse du prix du carburant, l'augmentation du tarif de l'énergie, les difficultés d'approvisionnement en matières premières, l'inflation, la pénurie de matériaux et les difficultés à rembourser les aides de l'État, au premier rang desquelles figure très probablement le PGE (prêt garanti par l'État).

 

La hausse généralisée des prix représente le boulet le plus important pour l'activité des artisans : 14% des répondants ont subi une baisse de chiffre d'affaires (CA) de plus de 25% en comparaison à la même période de l'année dernière. Un moment où le dynamisme n'était pourtant pas de mise puisque la France connaissait alors son troisième confinement sanitaire face à l'épidémie de coronavirus... La tendance est contrebalancée par une autre statistique : 60% des sondés ont constaté une diminution de leur CA inférieure à 15%.

 

Ce qui fait dire à 56% des artisans que "la question de la survie de leur activité n'est pas engagée" en dépit du contexte actuel - un chiffre encourageant mais qui témoigne quand même d'une peur non dissimulée. "Cet état d'esprit conforte notre analyse. Ces signaux à bas bruit sont des indicateurs importants", estime Joël Fourny. "J'y vois le signe d'une réduction des marges des entreprises qui intervient dans un contexte de tension sur les trésoreries et de fragilité, conséquence directe de la crise sanitaire."

 

Une rentrée "compliquée" ?

 

Cette fragilité pourrait de surcroît déboucher sur une rentrée "compliquée" en septembre prochain, ouvrant la voie à une multiplication des faillites chez les artisans. Une manière de générer des économies est d'accélérer la transition énergétique, ce sur quoi le réseau CMA rappelle bénéficier de diagnostics financés par l'État et qui lui permettent d'accompagner les entreprises désireuses de s'engager dans cette voie.

 

 

Mais alors que 72% des artisans disent déjà limiter leurs déplacements professionnels faute d'une facture de carburant qui s'alourdit, d'autre solutions sont évoquées. Baisser la fiscalité, réduire le prix du carburant sur le modèle de ce qui est accordé aux pêcheurs - passer l'aide en vigueur de 18 à 35 centimes -, inciter financièrement les entreprises à acquérir des véhicules plus "propres" ou encore mettre en place un chèque carburant, seraient autant de pistes à envisager.

 

De même, il y a encore du chemin à parcourir dans le domaine de l'efficacité énergétique. Les artisans sondés par CMA estiment à environ 20% la hausse du coût de l'énergie, sachant que les professionnels utilisent à 56% de l'électricité, 16% du gaz, 12% du fuel et 4% du bois. Et là encore, c'est au niveau financier que ça coince : 1 artisan sur 2 dit ne pas avoir investi dans des équipements d'économie d'énergie depuis un an car ces derniers ne s'avéraient pas adaptés à leurs besoins. Et pour 35% d'entre eux, les prix de ces équipements étaient qui plus est jugés prohibitifs.

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