La grossesse est source de nombreux changements pour le corps. Parmi eux : une possible apparition, accentuation ou diminution de l’eczéma, seconde maladie de peau la plus fréquente après l’acné. Nos explications pour mieux la comprendre et la traiter.

L’eczéma pendant la grossesse, ça vient d’où ?

Avant toute chose, il est important de mieux comprendre l’eczéma de façon générale. En quelques mots, il s’agit d'une atteinte inflammatoire de la peau que l’on reconnaît à un certain nombre de caractéristiques cliniques : bien souvent, une plaque rouge associée à un œdème et/ou des vésicules ainsi que des démangeaisons. « Il est important de différencier deux types d’eczéma : l’eczéma de contact et l’eczéma atopique ou dermatite atopique », nous explique la Dre Claire-Alice de Salins, dermatologue à Lorient, qui travaille régulièrement avec l’Association française de l’eczéma.

Comment les différencier ?

L’eczéma de contact est une forme d’eczéma ponctuelle, dû à un allergène. Par exemple : une réaction sur la zone des mains provoquée par le port de gants en latex chez une personne allergique à cette matière. L’eczéma de contact ne concerne donc qu’une partie du corps, celle qui a été en contact - comme son nom l’indique - avec l’allergène. Pour soigner l’eczéma de contact et éviter une nouvelle récidive, il suffit de supprimer de son quotidien l’allergène, une fois identifié.

L’eczéma atopique, lui, est une maladie intrinsèque qui n’est pas forcément provoquée par un élément extérieur - comme un allergène - et qui se manifeste souvent chez des personnes souffrant par ailleurs d’asthme et de rhinites allergiques. « Cette forme d’eczéma est fréquente chez le petit enfant et le nourrisson - jusqu’à 20 % des enfants - et peut disparaître avec le temps », précise la Dre Claire-Alice de Salins. Contrairement à l’eczéma de contact, l’eczéma atopique ou dermatite atopique peut lui se manifester sur l’ensemble de la peau.

Pendant la grossesse, il est possible de voir apparaître ce trouble cutané chez des femmes ayant un terrain atopique personnel ou familial favorable à l’eczéma, mais n’en ayant jamais souffert jusqu’alors. C’est ce qu’on appelle une éruption atopique gravidique. Celle-ci peut complètement disparaître à la fin de la grossesse, mais réapparaître lors d’une prochaine. Elle est sans conséquence sur la santé de l’enfant à naître. « Il est important de différencier l’eczéma d’autres troubles cutanés de la grossesse, qui ne sont pas forcément liés à l’eczéma », prévient notre experte. « On peut citer l’éruption polymorphe de la grossesse, qui se situe généralement autour du ventre et qui génère de fortes démangeaisons. Ou encore la cholestase gravidique, une maladie du foie qui provoque elle aussi des démangeaisons, mais qui n’est pas liée à l’eczéma. »

Par ailleurs, quand une femme souffre déjà de dermatite atopique, elle peut voir ses poussées s’accentuer ou au contraire se calmer pendant la grossesse. « Pendant la grossesse, le système immunitaire est davantage tolérant pour accepter le fœtus qui est en train de grandir, ce qui à tendance généralement à améliorer la dermatose inflammatoire, c’est-à-dire l’eczéma ou encore le psoriasis », explique la Dre Claire-Alice de Salins. « Ce n’est pas systématique, chez certaines femmes, les symptômes de l’eczéma atopique vont avoir tendance à s’aggraver. Notamment chez les femmes qui vont avoir peur d’utiliser leur traitement à la cortisone pendant leur grossesse. Les poussées ne sont alors pas traitées et ont tendance à s’accentuer. »

Quel traitement médicamenteux pour l’eczéma pendant la grossesse ?

Face à des poussées d’eczéma de contact ou dermatite atopique, il existe plusieurs traitements compatibles avec la grossesse. « La cortisone locale, souvent prescrite, fait l’objet de beaucoup d’inquiétudes de la part des patientes enceintes. Pourtant, il n’y a aujourd’hui aucune contre-indication à l’utiliser pendant la grossesse et celle-ci est sans risque pour le futur bébé », rassure la Dre Claire-Alice de Salins.

À contrario, le Protopic et son générique le Takrozem - à base de tacrolimus -, souvent prescrits en seconde intention (particulièrement en cas d’eczéma sur le visage) ne sont pas compatibles avec la grossesse. Notre experte conseille « d’en parler à son dermatologue avant de tomber enceinte afin de remplacer le traitement jusqu’alors mis en place. »

En cas de poussées sévères, d’autres traitements que la cortisone peuvent être utilisés. « On peut proposer par exemple une photothérapie U.V.B (la photothérapie PUVA étant déconseillée pendant la grossesse) ou de la Ciclosporine », poursuit la Dre Claire-Alice de Salins

Quel traitement naturel pour lutter contre mon eczéma de grossesse ?

En matière de traitement naturel face à l’eczéma, la Dre Claire-Alice de Salins rappelle que « rien n’a été vraiment prouvé actuellement, que l’on parle d’alimentation, de compléments alimentaires ou d’huile essentielle qui, concernant ces dernières, ont même tendance à aggraver l’eczéma. En revanche, de nombreux gestes peuvent prévenir l’apparition des plaques. »

Parmi ces gestes, l’instauration d’une routine d’hygiène douce et régulière. « On conseille une hygiène très douce, avec de l’eau pas trop chaude voire tiède, des produits lavants sans savon (un pain dermatologique ou une crème lavante par exemple) et d’appliquer régulièrement une crème hydratante (de préférence pour peau réactive) ou un baume émollient. L’important est de ne pas être agressif avec sa peau », préconise l’experte.

Le froid est également un facteur encourageant l’eczéma. Attention donc à bien vous couvrir quand les températures sont à la baisse et à favoriser des matières respectueuses de la peau dans le choix de vos vêtements.

Enfin, le stress peut lui aussi entraîner des poussées de dermatite atopique. Le recours au yoga prénatal, à la méditation ou à un sport doux peut aider à réduire son stress au quotidien.

Eczéma et hérédité : mon enfant risque-t-il d’en souffrir ?

L’eczéma peut-il être héréditaire ? Dans le cas d’une dermatite atopique, la réponse est oui. « Il y a un vrai facteur héréditaire, entre 50 % et 70 % des individus atteints d’eczéma ont un parent lui aussi touché. Il y a donc une vraie possibilité de transmettre ce trouble cutané à son enfant », confirme notre experte.

En revanche, il est important de savoir que la puissance des poussées d’eczéma pendant la grossesse n’a pas d’impact sur ce risque de transmission. Rappelons que l’eczéma n’est pas une maladie contagieuse et ne peut pas être transmis de la mère à l’enfant par simple contact de peau. Seul le facteur génétique joue ici un rôle. Si votre compagnon ou vous souffrez de dermatite atopique, n’hésitez pas à en avertir votre pédiatre, qui vous expliquera les possibles symptômes à surveiller chez votre enfant.

Un grand merci à la Dre Claire-Alice de Salins et à l’Association Française de l’Eczéma.