Depuis une semaine déjà, la paroisse Saint-Lambert-de-Vaugirard, dans le 15e arrondissement à Paris, avait pris les devants. Sous l’impulsion de la vice-présidente du conseil pastoral, des bénévoles avaient commencé à condamner un banc sur deux avec des rubans de chantier, à marquer sur les bancs disponibles les places accessibles (une seule à chaque bout, soit près de 2 mètres d’écart entre deux fidèles, plus que les 1,5 mètres préconisés par le diocèse de Paris dans une fiche envoyée aux paroisses depuis mi-mai).

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Ce samedi 23 mai, quand l’information de la publication, dans la nuit, du décret autorisant les célébrations publiques, s’est répandue à l’heure du petit-déjeuner, la paroisse était déjà presque prête à accueillir une première messe publique. « Cet après-midi, nous nous sommes retrouvés à une dizaine de personnes pour achever les préparatifs », raconte Isabelle Niel, la chef de chœur. Et à 17 h 45, les cloches ont sonné à toute volée pour annoncer la messe de 18 heures.

Des mesures barrières bien respectées

À l’entrée de l’église, Lorraine, 34 ans, membre du conseil pastoral, et Capucine, 35 ans, engagée dans la paroisse, aspergent de gel hydroalcoolique les mains des personnes qui se présentent. Masqués, les fidèles qui montent les marches cèdent volontiers au rituel avant de pénétrer dans l’église, un peu gauches devant les marquages au sol indiquant sens de circulation et distanciation d’un mètre.

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Seule une personne âgée, sans masque, refuse celui que lui propose Lorraine. « Si le gouvernement vous demande de vous jeter par la fenêtre, vous n’allez pas le faire ! » s’insurge-t-elle en apprenant que le port du masque est la condition sine qua non pour assister à la messe, avant de rebrousser chemin.

150 fidèles pour 750 places dans l’église

« Dans l’ensemble, les gens sont vraiment heureux de venir, et manifestent leur joie de retrouver même ceux qu’ils ne connaissaient pas bien », raconte la jeune femme. Dans l’église, chacun trouve sa place, à bonne distance de son voisin, exception faite des couples qui, vivant ensemble, sont dispensés de distanciation en public. 150 fidèles occupent ainsi les 750 places de l’église, un nombre moins important qu’un samedi soir ordinaire selon le père Michel Callies, curé de la paroisse.

« Ça fait du bien de nous retrouver ! », s’exclame-t-il, après le chant d’entrée. Dans son homélie, il s’adresse aux fidèles qui n’ont pas pu communier depuis le début du confinement. « Être privé de l’eucharistie pendant deux mois, ça peut faire du bien pour redécouvrir qui est Jésus », explique-t-il. Vient le moment de la communion, où des consignes sont données aux fidèles invités à respecter le fléchage au sol et une distance d’un mètre avec la personne la précédant dans la file, à ouvrir bien à plat la paume de sa main pour que l’hostie puisse y être déposée sans toucher la main…

Lorsque la messe s’achève, chacun est invité à quitter l’église par des portes latérales. « Si vous voulez discuter, vous pouvez le faire en gardant vos distances… », souligne le père Callies, alors que les horaires du dimanche, durant lequel quatre messes au lieu de trois seront célébrées, pour éviter l’affluence de la messe de 11 heures, sont annoncés.

« La dimension communautaire et concrète manquait »

« Quelle joie, après 10 dimanches sans messe ! », s’exclame Véronique à la sortie. Fréquentant habituellement une autre paroisse, qui ne reprendra ses célébrations publiques que pour la Pentecôte, elle a « mené son enquête sur Internet » pour découvrir dans quelle église elle pourrait se rendre ce samedi soir.

« Quand j’ai communié, j’ai pensé à toutes les personnes privées d’eucharistie dans les pays où les chrétiens sont persécutés », confie-t-elle, reconnaissant que les célébrations suivies par Internet pendant le confinement lui ont permis de vivre plus intensément cette première messe de ce samedi. « Cela fait très très plaisir de retrouver la messe, reconnaît Catherine, yeux pétillants par-dessus son masque. Même si quand l’épidémie était plus virulente je trouvais ça très bien que tout le monde reste chez soi. »

« La dimension communautaire et concrète manquait », explique le père Callies. Lorraine, elle, est restée à l’entrée pendant toute la cérémonie. « Des personnes sont arrivées au compte-gouttes pendant toute la messe, raconte-t-elle. Certains n’étaient pas au courant de la reprise des célébrations publiques, et sont venus en entendant l’orgue et les chants. D’autres se sont informés sur les horaires de demain… »